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Charles Koechlin
quatuors à cordes n°1 – n°2
Ayant suivi l'enseignement ponctuel ou régulier de membres du Fine Arts Quartet, des quatuors Hagen ou Talich (entre autres), le Quatuor Ardeo a déjà remporté de nombreux prix, que ce soit celui de la Fondation Polignac ou ceux décernés par les villes de Moscou (2004) et Bordeaux (2005). C'est dire si nous étions impatients d'écouter les quatre Françaises, de surcroît dans un programme qui défend la musique hexagonale : les Quatuors n°1 et n°2 de Charles Koechlin (1867-1950).
Scientifique de formation, auteur de nombreuses œuvres dialectiques – Traité d'harmonie (1924-25), Traité d'orchestration (1954-59), Traité sur la polyphonie modale (1931) –, il n'est pas étonnant de voir le créateur des Heures persanes consacrer trois opus à une formation associée à la quintessence musicale. Ceux-ci seront révisés jusqu'en 1921, dans l'enthousiasme de la création du premier (19 mai) et du point final apporté au dernier (15 août).
Les brouillons du Quatuor Op.51 n°1 portent les dates du 22 mai au 6 juin 1902, mais la composition proprement dite s'étale de 1911 à 1913. En plus d'une gestation assez longue, Koechlin conçoit encore des variantes (conforme à l'édition), jusqu'au 28 février 1921. Dédiée à André Gédalge, cet élève de Massenet devenu professeur de contrepoint et de fugue au Conservatoire de Paris, l'œuvre, si l'on exclut quelques pièces précédentes, représente la véritable entrée du compositeur dans le monde chambriste. Cet essai signale déjà un équilibre remarquable entre musicalité et maîtrise technique, climats champêtre et sacré (Allegro moderato), connaissance et innocence (Scherzo), innovation et pastiche (Finale).
Devenu Première Symphonie Op.57bis après l'orchestration de 1927, le Quatuor Op.57 n°2 n'a jamais été officiellement créé, demeurant archivé comme une œuvre expérimentale. On peut y cerner certaines pistes de recherches : étude d'harmonies sans véritable thème (Adagio), métrique insolite pour l'époque (Scherzo), durée de mouvement déséquilibrée (dix-sept minutes pour le Finale), etc. C'est une belle osmose qui s'opère entre les interprètes et la musique du compositeur – à la fois « développée et intérieure », comme il l'a définie lui-même en 1932. Leur art d'installer des climats languides s'appuie sur une maîtrise remarquable de délicatesse et de nuance, source de ciselés d'une grande pureté. Les passages plus rythmés recèlent une allégresse jamais sauvage, bien qu'ils semblent plus bondissants que réellement dansants. Cet enregistrement mérite particulièrement d'être salué.
LB